La volière

" Non... Rien à voir avec la vieille. Bien plus... cruel encore. " crache-t-elle dans un rictus haineux.

Un voile fugace assombrit encore davantage son visage.

" Un petit angelot... On peut voir ça comme ça. Pas de diablotin de l'autre côté, en revanche : l'angelot est perché sur l'épaule du Diable en personne. Mais inutile de me souffler comment faire le bien, je n'y parviendrai pas. Ce que je te demande, c'est de m'empêcher de faire le mal, quand c'est nécessaire. Encore une fois, je suis désolée de te demander ça, mais... Quand je vois ce qui vient de se passer, je crois que je n'ai pas d'autre choix. Je vais, bien sûr, tenter de me contrôler moi-même, mais... Je ne peux pas me faire confiance. Et je sais... Je sais que tu ne peux pas surveiller mes faits et gestes constamment. Mais je n'en demande pas tant. Empêche-moi au moins de faire en sorte que tu me haïsses. "

" D'enfant, j'ai failli en tuer une. Et tué un, mais chut. Mais c'est une image. Disons que je n'ai besoin de personne pour me dire comment mal agir, c'est mon naturel. "

Elle sourit faiblement.

" Si je te le demande, c'est que ça l'est. Ce n'est pas quelqu'un chose... que je peux comprendre, ou définir. Encore moins expliquer. Je n'en ai pas envie, c'est tout. "

Pauvre fille qui ignore tout de l'amitié, qui ne sait pas aimer. Quand ils ne tiennent ni de la haine ou de la rancoeur, ses sentiments, elle ne peut les comprendre.

" Tu crois qu'on... va avoir des problèmes, pour ce qui s'est passé avec Morgane ? Ça non plus, tu n'as pas un moyen de le deviner ? "

" C'est exact. Mais je ne regrette pas celle que je suis devenue. Jamais plus je ne veux me sentir faible. "

L'ancienne Apolline, elle, aurait encaissé les insultes de Morgane dans le silence, aurait laissé sa salive couler le long de son visage sans broncher.

" Peut-être. Elle souffle du nez. Relation positive... Je me demande bien ce qu'il peut y avoir de positif pour toi, là-dedans. "

Elle secoue la tête.

" Enfin bref. Tu as raison, si elle veut me dénoncer, elle devra d'abord expliquer les raisons qui m'ont poussée à agir ainsi. Et elle doit facilement s'imaginer les conséquences qu'aurait une potentielle délation de sa part. Je pense qu'elle gardera le silence, en effet. Je me demande si nous la verrons au rendez-vous avec Jane Suline... Enfin, si nous-mêmes nous y rendons. Que fait-on, par rapport à cette histoire ? " s'enquit-elle.

" Nous en avons déjà parlé. Te souviens-tu, petit coeur ? Ses lèvres s'étirent en un sourire légèrement moqueur. Tu es si... vulnérable, au fond. Mais c'est peut-être pour ça que je t'apprécie. Tu n'as rien de cet homme fort et dominant, à mes yeux, tu es... Un gentil chaton qui bombe le torse, et feule toutes griffes dehors pour ne pas laisser deviner la fragilité de son trop grand coeur. Mais quelque part, tu es fort également. Tu es si... ambigu. Je pense que c'est autant par faiblesse de coeur, que par force de caractère, que tu ne m'as encore laissée tomber. "

Elle pousse un petit rire étrange.

" Alors je prends la décision de ne pas te laisser y aller seul. Surtout si Morgane est au rendez-vous. "

" Gentillesse... Elle souffle du nez. Ou Jalousie. Peut-être Egoïsme ? Peut-être suis-je une amie possessive, ou bien encore suis-je une vipère qui refuse de partager sa proie... Qui sait ? C'est si bon, le chaton. " s'amuse-t-elle, un sourire indescriptible sur les lèvres.

Elle se dirige alors vers la sortie de la Volière.

" Malheureusement, la pause touche à sa fin. Les cours vont bientôt reprendre... Viens. J'ai déjà hâte de retrouver Morgane. " dit-elle en éclatant de rire.

Ensemble, ils descendront donc les marches pour se rendre à l'un des derniers cours de l'année.

Lawrence errait dans la volière plus pour tuer le temps qu'autre chose, qui pourrait bien lui envoyer du courrier après tout ?
Ainsi il fut surpris lorsque une lettre lui tomba entre les mains, et la terreur l'emporta bientôt sur la surprise lorsqu'il jetta un coup d’œil sur cette lettre.
Il avait mille question en tête, à commencer par pourquoi l'avoir choisi comme récipiendaire du courrier...
Pour en avoir le cœur nette, il n'y avait pas trente-six solutions. Il allait devoir se rendre jusqu'à la forêt interdite...

Slawek, qui s'était rendu à la volière pour vérifier ses lettres. C'est là qu'il la vit, la mystérieuse lettre. Il n'osa y toucher, mais finit alors par la prendre, regardant le recto-verso, il observa autour de lui avant de sortir, se dirigeant vers la tour de sa maison.

Une silhouette émaciée, pas traînant et cape flottante, avançait péniblement sur les vieilles marches de pierre de la tour. L’ombre sinistre du garçon se profilait alors dans la volière ; son visage maladif, qui traduisait sans doute une insondable peine, pâlit lorsqu’une lettre à son nom s’échappa des griffes d’un oiseau laid. Un nom inscrit d’une encre morbide, dans une teinte qui réveillait chez le jeune homme un sentiment d’une inexplicable intensité. Les quelques mots qui semblaient s’adresser à lui étaient étonnamment catégoriques. Otto balaya du regard le lieu, s’assura qu’il était seul, et déplia délicatement l’enveloppe sans se soucier plus particulièrement de son contenu.

Danger, c’était le message que lui bombardait son esprit. Mais l’autrichien, au lieu de peur, semblait excité à la simple pensée d’un affrontement pour sauver une vie. Peut-être pourrait-il rendre fier le chevalier de Stabenrath et ses ancêtres en s’illustrant lui aussi comme défenseur de l’honneur familial ?

Le jeune homme décida de retourner d’où il était venu - du néant- sans un mot. À mesure que le son de ses pas résonnait, une lettre se consumait lentement sur le sol.

Mei salua Emily la trouvant un peu bizarre, se demandant ce qu'elle avait ENCORE, elle laissa son oiseau après une énième couche d'eau pour aller à sa rend contre.

"Et ou tu vas comme ça ?"

Emily se stoppa à moitié chemin, ne sachant pas quoi répondre. La lettre précisait bien de n'en parler à personne, et Emily n'avait aucun moyen de savoir que Meï avait reçu la même lettre qu'elle. Lui parler trop longtemps serait une erreur, plus elle parle, plus elle risquerait d'en dévoiler. Elle prit donc exemple sur sa soeur et, pour la première fois de sa vie, ne parla que très peu, d'une voix faible, sans regarder Meï dans les yeux.


- Rien ... Nulle part ...

Elle fronça les sourcils, cette réponse ne lui plaisait absolument pas, à croire qu'elle à trop pris de sa sœur Norah sur le coup. Mei sentait qu'il y avait quelque chose de bizarre d'étrange, elle ne put s'empêcher de lui dire suspicieuse. 

"Si d'aventure tu aurais un problème tu me le dirais ? je l'espère non ?"

Elle n'était pas du genre à abandonner, maintenant qu'elle c'était liée à Emily dans cette étrange pièce avant qu'elle ne soit possédée, mei n'hésitait plus à venir quand elle voyait que quelque chose n'allait pas. Elle avait les bras croisés attendant des réponses à ses questions, l'observant droit dans les yeux bien qu'elle essayait de fuir son regard. 

Emily hésita à parler. D'un côté, elle voulait en parler, mais d'un autre, si l'expéditeur de la lettre le découvrait, elle mettait son amie en danger, et elle s'y refusait. Elle réfléchit, toujours sans regarder Meï ni répondre à sa question, lorsque lui vint une idée. Meï était dans la volière en même temps qu'elle, peut-être n'était-elle pas la seule à avoir eu une lettre mystérieuse ? Si c'était le cas, si Meï l'avait aussi reçu, elle pourrait en parler avec elle, en revanche, si ce n'était pas le cas, elle ne dirait rien, ne tenant pas à mettre son ami en danger. Elle se risqua donc à lui poser une question.


- Est-ce que tu as reçu une lettre ... étrange ... ?

"Une lettre étrange de couleur, à l'écriture rouge ? c'est bien sa ta question ?"

Demanda t'elle suspicieuse, se demandant qui avait bien pu lui envoyer une telle missive, elle n'avait pas pris le temps de l'ouvrir, ni de la regarder en détaille, dés qu'elle avait vu, qu'elle ne devait l'ouvrir que lorsqu'elle était seule, elle l'avait rangé dans sa poche comme si de rien était. Emily avait visiblement reçu une lettre similaire, comment c'était possible ? 

"Si c'est le cas, alors ou j'ai reçu une lettre similaire, mais je ne sais pas de qui...et je ne l'ai pas encore ouverte"

Emily sembla quelque peu soulagée que Meï ait reçu la même lettre, bien qu'inquiète. Elle regarda autour d'elle avec un regard empli de paranoïa avant de planter ses yeux dans ceux de Meï.


- Ouvres-la, dit-elle simplement.


Elle laissera le temps à Meï de lire sa lettre, jaugeant sa réaction du regard.