Une belle âme ?.. Margaret ? Peut-être, après tout. Elisabeth avait probablement raison. Elle aussi, probablement, avait-elle une belle âme. Une belle âme... C'était sûrement cela qui incommodait tant Apolline. De faire face à quelqu'un qui transpirait le bien, la pureté, la simplicité. Alors qu'elle, petite créature hargneuse, corrompue pourrie et souillée jusqu'au plus profond d'elle-même, se dégoûtait de tout son être. Voilà pourquoi elle peinait à soutenir le regard de la jeune fille, apeurée à l'idée que son innocence vienne à se salir en sondant la pourriture de son âme. Elle admirait cette candeur, cette bonté, mais plus encore les jalousait, les haïssait même. Dans son coeur malsain naissait une profonde rancoeur pour cette fille qui était tout ce qu'elle ne pouvait plus être. Elle souhaitait plus fort encore la voir disparaître, d'une part car sa simple présence la faisait souffrir de l'envie, et de l'autre car elle savait, elle sentait qu'elle allait finir par se montrer terriblement mauvaise d'un moment à l'autre. Elle avait, malheureusement, retrouvé tous ses esprits.
" Greengrass. A l'entente de son prénom, elle s'était souvenue de son nom. Elle ne l'appellerait pas Elisabeth, et encore moins Beth, mais par son patronyme, pour marquer la distance, aidée d'un vouvoiement forcé. Non, vous ne me dérangez pas en me parlant. C'est votre présence même qui m'insupporte. Je suis venue ici pour être seule. " assène-t-elle sèchement, le dos tourné.
Elle tend le bras vers l'avant, et sa chouette vient délicatement s'y nicher. Lentement, elle lui caresse la tête.