Southampton, maison de la famille Summers

Tout juste sorti du véhicule, Charles resta pantois quelques instants à la vue de la bâtisse. Si la demeure du blondinet ne payait à première vue pas de mine, elle avait cependant un charme indéniable, semblant comme dégager un aura éminemment bienveillant qui portait à croire que n'importe qui pourrait s'y sentir chez lui.

- C-C'est magnifique.. M-Michael.

Ainsi le considérait-il comme son ami ! Ses lèvres s'étirèrent en un petit sourire tandis que ses joues se rubéfièrent à cette idée. S'avançant d'un pas timide jusqu'à arriver entre le fils et la mère, il courba respectueusement l'échine face à cette dernière.

- M-Merci de votre accueil m-madame.. j-je suis d-désolé de ma venue impromptue..

Le prénom de la mère du blondinet ne semblait pas l'avoir interpellé.

Charles ne comprenait pas. Pourquoi l'atmosphère semblait comme soudainement s'alourdir ? Il tenta de sonder son ami du regard, mais ses yeux fuyants n'aidèrent en rien.

- M-Michael.. t-tu peux tout me dire, t-tu sais..

Il avait beau chercher, le coquebin n'arrivait pas à mettre la main sur la raison de l'attitude du blondinet. Lui qui était d'habitude si fort, si rassurant, paraissait comme chancelant en cet instant.

Interpellé ? C'est-à-dire qu'il avait bien compris à la sonorité de son prénom que la mère du blondinet n'était probablement pas d'origine anglaise, mais qu'importe ? Il venait lui-même d'un autre pays que le Royaume-Uni. Il le laissa continuer en silence, observant les expressions de son visage au fur et à mesure qu'il se dévoilait. Juif ? Ses yeux s'embuèrent de larmes.

- M-Michael.. j-je suis d-désolé que vous ayez eu à v-vivre tout ça.. j-je..

D'un geste empreint de sollicitude, il déposa délicatement sa main sur l'épaule de son ami.

Il désapprouva les dires du blondinet d'un léger hochement de tête. Affermissant sa poigne sur son épaule, il répondit d'une voix placide, qu'il espéra rassurante.

- T-Tu te trompes.. c-c'est normal d'avoir peur en s-sachant ce qui aurait pu vous arriver.. T-Tu es brave Michael, crois-moi. T-Tu l'as déjà amplement démontré.

Sur ces mots, les deux jeunes sorciers pénétrèrent dans la maison du blondinet. Tandis que Charles se déchaussait une fois la porte traversée, il le questionna.

- A-Au fait.. t-tu as jeté un coup d'œil à ce que tu as trouvé dans la f-forêt..?

"Oui. Il y avait une adresse et un nom sur le fond de la fiole. Jane Suline, à Godric's Hollow." Répond le sorcier en refermant la porte derrière lui

Il resserra ses sourcils en un froncement perplexe.

- Jade Suline..? E-Est-ce que ça te dit q-quelque chose..?

Cette adresse était-elle présente sur ses trouvailles, à lui aussi ? Se demanda-t-il - intérieurement, s'entend.

- J-Je ne m'y suis toujours pas penché de m-mon côté..

Il acquiesça d'un petit hochement de tête.

- J-Je te suis et.. m-merci encore.

Ses joues prirent une petite teinte incarnate.

Charles demeura interdit quelques secondes au seuil de la porte ; cette chambre était-elle vraiment pour lui ? Cela changeait définitivement de chez son oncle, et il remercia une énième fois le Seigneur d'avoir placé sur son chemin un ami aussi bon que ce blondinet.

- C-C'est parfait M-Michael.. m-merci.

Il pénétra dans la chambre d'un pas timide, presque honteux. Après tout, sa venue à l'improviste était discutable d'un point de vue des convenances. Il déposa sa valise, l'ouvrit, puis sortit toute sa bastringue qu'il déposa sur le lit ; plus que de vêtements, ses affaires étaient foncièrement composées d'ouvrages et parchemins en tout genre, traitant tant du monde des moldus que de celui des sorciers.

Oui, il devait se détendre. La famille du blondinet l'avait accepté, et son oncle était à des centaines de kilomètres de là. Que diable avait-il donc à craindre ? Rien, pour sûr. N'est-ce pas ?

- T-Tu as raison.

Il balaya du regard ses affaires étalées sur le lit, attrapa ses trouvailles issues de leurs péripéties forestières, puis s'approcha de Michael.

- R-Regarde.

Les deux jeunes sorciers examinèrent donc ensemble lesdites trouvailles.

Il déglutit difficilement à la question du blondinet, tant et si bien qu'il en toussa virulemment. Qu'était-il censé dire ? La vérité sur sa situation familiale ? Alors que Michael ne pourrait rien y faire et ne ferait qu'en souffrir inutilement ? Pendant un certain silence qui précéda sa réponse, il resta ainsi absorbé par ses songes.

- M-Mon oncle me fait vivre un enfer..

Finit-il par avouer avec effort, mais, d’un seul coup, au cinquième mot, sa voix se mit à sonner, à vibrer comme une corde tendue. Son souffle se coupa, quelque chose lui pesa sur la poitrine.

Il hocha veulement la tête en signe de désapprobation.

- T-Tu n'as pas à t'excuser.. C-C'est bien le minimum que je puisse faire pour toi que de répondre à tes questions a-après que tu m'aies si gentiment ouvert ta p-porte.

Il sentit que ses jambes commencèrent à chanceler, et préféra donc s'asseoir sur le lit pour poursuivre.

- M-Ma mère est décédée il y a quelques années.. q-quant à mon père, je ne l'ai j-jamais vraiment connu ; i-il est mort alors que je n'étais qu'un bambin. U-Une fois devenu orphelin, mon oncle a demandé ma garde.. p-probablement car il espérait pouvoir accaparer mon héritage. Il commença à marmonner pour lui-même. Il a du être bien déçu de voir qu'il n'y avait rien à se mettre sous la dent, ce maraud.. Ah ! Il toussota, resta silencieux pendant un instant, puis reprit à voix haute. I-Il m'empêche même de prier, Michael. Q-Que je doive me débrouiller pour me nourrir, q-que je doive quitter la maison les nuits durant lesquelles il organise ses soirées.. j-je veux bien.. m-mais qu'il m'empêche de prier, Michael ? Ses yeux se voilèrent de larmes.