Godric's Hollow

Charles adressa un regard peiné à sa compatriote. Elle avait voulu fuir, certes. Toutefois, ne s'était-elle pas finalement ravisée pour leur prêter main forte ? D'un pas léger, le coquebin s'approcha de la Serpentard avant de s'adresser à elle de son usuelle voix placide.

- A-Apolline. D-Désolé de m'être emporté.. j-je suis content que tu aies décidé de nous aider. M-Merci.

Il salua la sorcière en courbant légèrement l'échine l'espace de quelques instants.

Morgane se tut face à la colère de Michael, pestant à la fois contre Apolline mais aussi contre elle meme, car le Jaune avait raison, la situation avait dégénérée par sa faute et la sienne uniquement. Avec du recul, il lui semblait stupide, et meme risible, d'avoir pensé que lancer un caillou avec un Waddiwasi serait d'une quelconque utilité face a un mage noir, elle se retint toutefois de rire, car meme un rire amer, plein de regrets, risquerait d'etre mal interprété par ses camarades. Quelques minutes de plus passèrent avant qu'elle se sentit reprendre peu a peu des forces, jusqu'a ce qu'elle décida en avoir assez pour essayer de se lever.


- Charles, Michael, je suis désolée mais l'un de vous pourrait-il m'aider, je ne suis pas sure de pouvoir marcher seule ...

Elle se tourna ensuite vers la vert et argent et lui offrit des paroles d'excuses qui lui arrachèrent une grimace.


- Désolée Apolline ... Tu essayais de sauver ta vie et celle de Michael et Charles ... Je n'irais pas jusqu'a dire que j'aurais fait pareil mais je comprends pourquoi tu l'as fait ...

Désolé, désolée... Ils sont tous désolés. Le pardon. Curieux. Elle ne pensait pas le mériter. Doit-elle, elle aussi, s'excuser ? Ne serait-ce pas trop déshonorant ? Après tout, avait-elle vraiment eu tort ? Elle garde un silence gêné quelques secondes, avant de leur répondre :

" C'est pas grave. Ce n'est rien. Partons d'ici, plutôt. "

Voilà, elle a parlé. Mais non, il manque bien quelque chose, elle ne veut pas le dire, et pourtant elle en ressent le besoin.

" Je suis... désolée, moi aussi. "

Aussitôt, sa culpabilité semble se faire plus légère, son attitude plus juste. Elle ne se sent pas plus honteuse qu'elle ne se sentait déjà l'être, peut-être même... Un peu moins. Après tout, eux aussi, s'étaient excusés. Elle ne s'abaissait pas plus bas qu'eux.

Supportée autant par Charles que par Michael, Morgane était enfin en mesure de se déplacer. Sans demander leur reste, les quatre jeunes gens s'éloignèrent rapidement du lieu de l'attaque, dépassèrent plusieurs pâtés de maison jusqu'à ce qu'enfin, ils furent certains d'être en sécurité. Après quoi, ils se débrouillèrent tous pour rentrer chez eux, d'une façon ou d'une autre.

Assise sur la terrasse de la villa Roy, Lucy remuait une cuillère dans une tasse de café en porcelaine, juste entre l'index et le pouce. Elle ne prenait guère attention à cela, préférant paraître la plus charmante possible, en toute circonstance.
Le dos bien placé sur sa chaise boisé, sa deuxième main caressait délicatement du bout des doigts un carnet, marbré de noir, aux coins dorés, une inscription à peine effacée sur la devanture : " Tom Elvis Jedusor ".
Lucy patientait, cela faisait quelques jours qu'elle avait envoyé une chouette à la jeune Saskia, elle espérait ainsi qu'elle accepte le rendez-vous. Serait elle la bonne ? 
En toute logique, la belle demoiselle n'avait aucun doute sur ses actions, sur ses observations, elle avait déduit de la jeune Saskia qu'elle pourrait être une sorcière à grand potentielle, pas facilement influençable, mais le fait est que c'est une jeune fille en recherche d'elle même. Le carnet pourrait lui fournir des réponses, en échange elle pourrait... Oui, elle pourrait...

- J'ai connu pire, bonjour. 

Répondit-elle avec un froid sec, comme à son habitude. Elle resta un instant à l'extérieur, dans l'expectative sans doute d'une invitation à entrer dans la propriété. Du coin de l'œil, elle observait la bâtisse qu'elle pouvait apercevoir derrière son interlocutrice, sans afficher à son égard d'émotion particulière. Rien chez Saskia ne paraissait avoir changé depuis leur rencontre à Poudlard, en dehors de sa tenue. 

- Ta mère et tes frères seulement ? Ta soeur, elle est pas là non plus j'espère ? 

Demanda-t-elle d'un air circonspect. Au vu de la relation des deux soeurs et de son propre passif avec Margaret, elle préférait que cette dernière ne sût rien de sa visite. Toujours fut-il qu'elle commença à marcher en direction du lieu indiqué tout en posant sa question.

- Parfait. J'veux bien du thé, s'il te plaît. 

Répondit-elle sans émotion, tout en s'installant à chaise qui faisait face à son interlocutrice. Elle ne savait pas vraiment s'il était poli en Angleterre d'accepter une marque d'hospitalité malgré les années qu'elle avait passé ici. Elle ne s'était pour tout dire jamais vraiment fait d'ami anglais. Ceci dit, sa gorge était sèche comme les steppes lors des étés cuisants, et un thé brûlant était une idée bien alléchante après cet ennuyeux et tumultueux trajet. Elle ne le montra pas, mais elle s'impatientait déjà de savoir pourquoi elle avait été demandée là. 

- Tom Elvis Jedusor... 

Lut-elle à voix haute dans un murmure. Un nom qu'elle connaissait bien, à présent. Un nom qu'elle avait entendu il y a quelques années déjà, et qui avait refait surface en force avec la tragédie récente. 


- M'sieur Ollivander m'a parlé de lui, quand il m'a donné ma baguette. Il a dit que la mienne et la sienne étaient faites du même bois. Ce qu'il a fait à la coupe du monde d'après les médias... Ce doit être un homme extrêmement talentueux. 

Dit-elle, presque plus pour elle-même que pour Lucy en réalité. Son intérêt était piqué à vif, à présent, et cela se voyait au travers de son regard qui devenait plus acéré que jamais à mesure qu'elle fixait le carnet, comme pour en percer ses mystères. Elle approcha une main étonnamment délicate de l'objet, et lorsque elle entra en contact avec, elle fut parcourue d'un frisson, et envahie d'un étrange sentiment.


- Je... Je suppose que ce n'est pas un carnet normal. Pourquoi me donner cela ? Ce ne doit pas être innocent. 

Son regard se déporta sur Lucy et se mit à l'examiner avec minutie. 

Sans tenter de verbaliser la sensation qu'elle avait ressenti en posant ses doigts sur la chose, car elle ne le voulait ni ne le pouvait véritablement, Saskia confirma l'avoir ressentie d'un hochement de tête lent et délicat. Elle but un peu de son thé, beaucoup même, quitte à s'en brûler la gorge car c'était ainsi qu'il était consommé dans son pays, quoique l'inhabituel lait l'eut attendrit et eut affaiblit son corps ardent. 


"Ce qu'il peut t'offrir." Rumina-t-elle dans sa tête. Certes, un mage de son envergure avait bien des choses à offrir, même au travers d'un carnet. Mais que pouvait donc demander une telle personne en échange de ses faveurs ? La dernière phrase de la sœur Roy vint confirmer sa première impression : il s'agissait là d'un échange et non d'un cadeau. Il n'avait aucune raison de vouloir que cet objet fut transmit pour le simple fait de le transmettre. Elle s'engageait là dans une voie dont elle ne pouvait mesurer ni les tenants, ni les aboutissants, mais dans une voie qui promettait son pesant de Grandiose. Peut-être était-ce ainsi que les colons espagnols se sentaient, lorsqu'un navire venait les prendre aux quais de Séville avec la promesse d'une cité d'or, légendaire et étincelante au bout d'un voyage dont ils ne savaient que peu de choses, qui les mènerait aux massacres, aux maladies, parfois à la richesse, et dans les bonnes grâces du roi pour ceux qui rencontraient le succès et gardaient intacte leur fidélité. C'était un sentiment grisant, qui lui brouillait la vue, qui l'absorbait tout entière. L'avarice, l'envie, elle était devenue pour un instant l'un ou l'autre de ces vices, peut-être les deux en même temps. 


Si elle pouvait effleurer son pouvoir, elle pouvait devenir ce qu'elle voulait. 


- Davaï davaï, j'en prendrai soin, et j'irai lui parler.

- Pas la peine ça ira merci, dit-elle en plaçant soigneusement le carnet dans sa sacoche. Au revoir. 

Sur ces quelques mots bien simples et bien froids, elle se leva et se dirigea vers le portail sans regarder en arrière.