Chambre d'hôpital de Saskia - Visites

Avant d'entrer, Margaret eut à subir le même protocole que Michael plus tôt dans la journée. L'homme à l'air bourru devant la porte entra tout d'abord dans la chambre, en fermant la porte derrière lui et en annonçant à Saskia le nom de la personne qui la visitait. Il ressortit environ une minute plus tard, et à partir de là les choses prirent une tournure sensiblement différente. Il exigea de Margaret qu'elle déposât sa baguette dans une boîte, et la soumit à un sortilège visant à analyser le contenu de ses poches. Elle put entrer après qu'il eut l'assurance qu'elle ne transportait rien de dangereux. 


Margaret trouva donc Saskia allongée là, visiblement amochée et incapable de parler, ou alors avec un tourment qu'elle ne devait pas spécialement vouloir s'infliger. Un genre de machine au mécanisme magique semblait respirer à la place de la soviétique. 


Saskia lança à Margaret son regard habituel, assez intense, perçant, mais teinté cette fois-ci d'une interrogation. Elle saisit sa baguette posée sur son lit, et en donna un petit coup bref pour actionner la plume posée sur la table de chevet, indiquant à Margaret où elle devait regarder pour communiquer. 


L'objet dessina sur un large parchemin un simple : 


«Bonsoir.»

La Serdaigle, de toute évidence, n'avait pas anticipé cette visite et ne savait pas encore trop sur quel pied danser avec celle qui avait partagé cette étrange valse en sa compagnie. 

«Tu n'as qu'à lui demander directement. Je ne suis pas dans sa tête. Je ne connais pas votre jeunesse commune. Je ne suis pas ta soeur.»

Fit-elle écrire à la plume. Il était difficile de savoir ce que Saskia ressentait, déjà en temps normal, mais d'autant plus sans entendre sa voix. Les traits d'encres cependant, semblait avoir quelque chose de légèrement... Rigides. Ils étaient tracés rapidement, sèchement, et sans soin pour former de belles lettres. Peut-être qu'une pointe d'agacement teintait la magie de Saskia.

«Je sais qui est ta soeur. Je sais aussi pertinemment que tu ne me dis pas cela par sympathie ou pour m'aider. Tu te fiches bien de cela. Je ne suis pas une contingence à ta disposition pour régler tes problèmes familiaux ou mener bataille contre ta soeur, et pourtant c'est ainsi que tu me traites depuis le début. Tu n'es pas si différente d'elle que tu le crois.»

«Es-tu sotte ? Ce n'est pas comme si je te voyais souvent avec ta soeur pour pouvoir imiter ses comportements à ton égard. Pourquoi je t'ai provoquée ? Tu ne crois tout de même pas que tes regards pleins de dédain étaient discrets avant le début des sélections ? Je n'ai fait que te rappeler à l'humilité, et dans ta haine aveugle, tu as façonné ce que tu voulais y voir. Tout ça pour ne pas oser me confronter avant que je sois à demi-morte, malgré une invitation claire à le faire... Si tu veux dépasser ta soeur, il va falloir faire sérieusement mieux que ça, elle est ce qu'elle est, mais elle est toujours à des lieues devant toi à tous les niveaux. Tu n'as pour l'heure que ses mauvais côtés, de ce que tu montres de toi.»

Le regard de Saskia demeurait intense, mais il était finalement assez complexe de savoir ce qu'elle ressentait ou ce qu'elle essayait de faire en disant cela à la Serpentard. Était-ce simplement une volonté de la malmener en appuyant sur des points sensibles avec la précision d'un acupuncteur et la douceur d"une barre à mine ? Ou bien s'agissait-il d'une forme de "conseils" douloureux, d'un coup de pied visant à faire accélérer sa "rivale" ? Nul doute qu'encore une fois, Margaret allait certainement percevoir ce qu'elle voulait là-dedans. 

La voyant partir, Saskia eut un dernier réflexe. D'un coup de baguette magique qui la fit atrocement souffrir, elle fit écrire quelques derniers mots formés à la hâte sur le parchemin, qu'elle projeta directement dans la main de Margaret. 


«Je ne sais pas à quoi tu joues avec Richard, mais c'est une très mauvaise idée.» 

L'encre étant formée par un charme de sorte à ce que la Serdaigle pût utiliser son parchemin à loisir pour communiquer avec les invités, elle s'effaça rapidement et à jamais après que Margaret eut lu le message - ou pas.

Surpris qu'elle accepte de le voir, l'élève de Durmstrang entra dans la chambre, s'assurant que la porte s'était bien refermée.


- Triste état dans lequel tu te trouves, Saskia. Cela réussirait presque à me convaincre que ton "agression" n'était pas un coup monté pour mettre l'Alliance dans l'eau chaude, dit-il avec un léger sourire.


Il déposa alors son bouquet de fleurs sur les genoux de la fille.


- Cadeau.

Comme à chaque fois, elle anima la plume pour répondre à sa place, cette fois sans quitter un seul instant son interlocuteur des yeux. Pas même pour regarder les fleurs, présent qu'elle savait hypocrite de toute manière. Elle les dégagea d'ailleurs de ses genoux immédiatement en les faisant léviter en direction d'une table plus loin dans la pièce.


«Merci. J'ai lu à propos de ces théories dans les journaux, mais honnêtement je ne vois pas qui aurait monté un coup pareil. Cinq hommes sont morts, j'ai moi-même failli y passer et je suis mineure, il y a eu des victimes civiles. À ma connaissance, seule l'Alliance fait usage de ce genre de méthodes. Tu devrais le savoir aussi. Qui d'autre, alors ?»

Richard souffla du nez.


- Bien sûre, l'Alliance c'est les gros méchants, et la Coalition c'est les héros. Je sais que toi même tu n'y crois pas, Saskia. La Coalition aurait très bien pu être capable d'un tel acte, tu le sais très bien.

Il marqua une pause.


- Même si pour le coup, peu importe qui a fait ça, ils y sont allés forts. C'est un autre groupe souhaitant foutre la merde, peut-être? C'est une option à envisager, je crois. Même si je n'y verrais pas vraiment l'intérêt. De t'agresser ainsi, j'entend.

Saskia était bien placée pour faire preuve de plus de nuance. Il n'avait pas tort, mais elle n'avait aucun intérêt à l'admettre. Se faire passer pour plus candide et innocente qu'elle ne l'était réellement présentait bien plus d'avantages. 


«Débattre Alliance et Coalition avec toi n'apportera rien, inutile d'insister.»

Se contenta-t-elle de rétorquer comme pour signer la position caricaturale et naïve qu'il lui prêtait avant de clore ce sujet inutile. 


«Tu disposes d'informations pertinentes pour avancer ce que tu soutiens au moins, ou bien le fais-tu par simple dogmatisme ?»

- Oh, mais je ne fais que penser à voix haute. Et puis, pas besoin de te dire que si je savais quoi que ce soit à ce propos, les chances que je t'en fasse part sont minimes. Sans offense.

Richard se tourna ensuite vers la nouvelle venue.


- Ah, mais si ce n'est pas la sœur de Margaret Roy, dit-il en la voyant. Oh, il connaissait son nom, mais il préféra parler d'elle ainsi pour voir sa réaction.


- Enchanté. Merci du compliment, cela me fait chaud au cœur.

«Pur dogmatisme, donc. Tu serais bien trop heureux de pouvoir factuellement disculper ton mouvement pour t'en priver, si tu en avais la capacité.»

Fit-elle écrire à la plume avant de se mettre en retrait de la conversation, n'étant pas dans les meilleures dispositions logistiques pour suivre le rythme d'une discussion orale avec plusieurs participants. Elle salua cependant Lucy d'un geste de la main assez faible, et celle-ci comprit à son regard que les nombreuses visites en question l'avaient exaspérée. Elle se mit en attente, que Richard s'en aille ou que l'un des deux la sollicite à nouveau. 

Richard roula des yeux en lisant le commentaire de Saskia.


- Bien sûre, bien sûre. J'avais oublié que nous étions si proches et que tu me connaissais si bien.

Il lui montra ensuite son dos pour s'adresser à Lucy.


- Pas besoin de t'excuser pour Margaret. Tu n'es pas responsable de ses actions. Et puis, tu dois bien te douter que si je l'ai accompagné au Bal des Trois Sorciers, à la vue de tous, je ne dois pas lui être très rancunier.

Richard ne put s'empêcher un léger sourire en voyant sa réaction.


- Parce que j'en avais envie, tout simplement. Parfois certaines choses s'expliquent difficilement. Mais je ne regrette pas le moins du monde de l'avoir accompagné. Ce fut une belle soirée.

Il se retourna ensuite vers Saskia, un rictus mauvais au visage.

- Pas vrai? Tu avais l'air si heureuse lorsque tu as dansée, bien collée, avec Margaret. Vous étiez si belles à voir. 

Il attendit quelques secondes pour voir sa réaction, autant que celle de Lucy, avant de se diriger vers la sortie. Il se retourna juste avant de sortir.


- Ce fut un plaisir de vous rencontrer, mademoiselle Roy, dit-il à Lucy.


- Je te souhaite un bon rétablissement, Saskia, dit-il ensuite à la Serdaigle, avant de partir définitivement.

Saskia ne réagit pas spécialement. Elle estimait ne plus avoir grand chose à prouver à Lucy ou - et surtout - à qui que ce fut d'autre après ce qu'elle avait déjà fait. Sa loyauté était hors de tout doute et les histoires de Margaret ne pouvaient plus changer cela aux yeux qui importaient vraiment. L'explication était de toute façon déjà toute faite. Elle salua vaguement Richard d'un geste de main qu'elle aurait volontier accompagné d'un soupir si elle avait pu contrôler sa respiration seule, et dès lors qu'il fut dehors, agita sa baguette. 


«Tu as réagi exactement comme elle le voulait. Elle n'en vaut pas la peine, tu le sais pourtant bien.»